Pénurie d’eau : la faute à pas d’chance ?

La Zone de Répartition des Eaux est l’appellation donnée par l’État à certains bassins en déséquilibre chronique entre les prélèvements d’eau et la ressource disponible. Cela fait 25 ans que le bassin du Clain est classé en ZRE : on y pompe bien plus que ce que les nappes souterraines et les cours d’eau peuvent fournir.

Le déséquilibre chronique se maintient, alors que la loi sur l’eau et le SDAGE* affirment que l’objectif doit être le retour à l’équilibre. C’est une sonnette d’alarme. Il est impératif de prendre les moyens d’un retour rapide à l’équilibre, réduire les prélèvements, en particulier ceux destinés à l’irrigation agricole qui représentent la majorité des ponctions sur l’eau. Qu’a-t-on fait depuis 25 ans ? Malgré les mesures annoncées, on arrive chaque année à des assecs qui détruisent les milieux naturels.

Ces seuils ont été fixés pour retarder le plus possible le moment des restrictions et non pas en fonction des besoins du milieu. Le travail scientifique pour définir le débit minimum biologique des cours d’eau n’a jamais été réalisé. Il suffit de voir le niveau du Clain depuis des années pour comprendre que les arrêtés préfectoraux de restriction arrivent toujours bien trop tard.

Il faut donc relever les niveaux d’alerte pour les nappes. En mars 2019, 75% de nappes avaient un niveau inférieur à la moyenne pluriannuelle. Il faut aussi réviser la liste des cultures « dérogatoires » qui sont irriguées malgré les coupures.

Dans la Vienne, le volume annuel des autorisations de prélèvements agricoles en rivières et en nappes ne baisse pas sensiblement par rapport à la consommation des dix dernières années. Dans le bassin du Clain, 10,5 millions de m3 sont déclarés « provisoires », en attendant d’hypothétiques « bassines » qui les stockeraient en pompant en hiver. On pomperait alors massivement dans les nappes du Clain alors qu’elles n’arrivent déjà pas à se recharger avec les pompages actuels.

Si des agriculteurs sont conscients de l’urgence d’économiser – il est difficile de passer d’une irrigation de rendement à une irrigation de sécurité –, c’est à la collectivité de les aider pour enfin respecter la priorité donnée par la loi à l’eau potable et à la protection des milieux aquatiques. D’autres le sont moins en prétendant qu’arroser le jour les champs de maïs est très efficace. Nous contestons fermement cette affirmation erronée.

Une pénurie d’eau potable a été frôlée en décembre 2018 par Grand Poitiers. En Vienne, 18 000 habitants ouvrent leur robinet sur une eau dérogatoire, trop chargée en pesticides !

Que faut-il attendre pour agir ?

 

 *Schéma Directeur d’Aménagement et de Gestion des Eaux

Photo : assec sur la Pallu (86). Crédit : Vienne Nature