Communiqué – Partage de l’eau : halte aux diversions, place aux solutions !

Communiqué – Partage de l’eau : halte aux diversions, place aux solutions !

Communiqué de presse interassociatif

4 novembre 2025

Trois ans de diversions, et c’est raté

La CLE (Commission Locale de l’Eau) du 5 novembre 2025 n’aura pas lieu. Motif invoqué par le préfet : le climat d’insécurité créé par les appels irresponsables à la violence de la part des irrigants pro-bassines et de leurs soutiens. Vienne Nature les condamne fermement, qu’ils visent Bassines Non Merci ou tout défenseur de la ressource en eau. Ils sont l’aboutissement de 3 ans de boycott du processus démocratique.

En 3 ans, c’est la 7e fois que la préfecture s’oppose à la reconnaissance par la CLE de la validité de l’étude HMUC (Hydrologie Milieux Usages Climat) : 4 fois par interventions directes du préfet en réunion, 3 fois par annulation pure et simple des réunions. Soumise aux ordres de préfets, mise sous pression par le lobby des méga-bassines, la CLE n’est plus qu’une caricature de « parlement de l’eau ».

Cette guérilla ne sert à rien : aujourd’hui, HMUC s’est imposée comme socle scientifique incontournable de tout programme d’adaptation au changement climatique sur la question de l’eau. La justice administrative l’invoque en annulant les bassines de La Pallu et le préfet Girier donne le coup de grâce en CLE en juin 2023 : « on ne vote pas une étude HMUC ».

Il reste cependant une autre technique pour contourner HMUC : falsifier certains résultats du rapport d’HMUC et les faire voter sous couvert de validation. Ce stratagème aurait pu marcher le 5 novembre : dans le texte mis au vote, les volumes prélevables hivernaux souterrains étaient doublés par rapport à ceux préconisés dans l’étude HMUC, ce qui aurait pu donner un peu de grain à moudre aux lobbyistes pro-bassines. Mais les irrigants veulent plus, beaucoup plus. Ils n’ont pas voulu de ce vote.

Ultime manœuvre : lier au vote d’HMUC l’approbation d’une étude « socio-économique » qui servirait à en réviser les résultats. Hâtivement bouclée dans le cadre du Projet de Territoire pour la Gestion de l’Eau piloté par le Conseil Départemental, cette étude prétend évaluer les conséquences d’HMUC sans prendre en compte les mesures d’adaptation des cultures qu’elle préconise. Elle sous-estime gravement les gains économiques qu’apportera la restauration des écosystèmes aquatiques et des capacités naturelles de stockage de l’eau. D’où des dégâts imaginaires sur l’économie qui nourrissent un chantage aux faillites sans fondement.

Dans cette ligne, la Préfète coordinatrice du Bassin Loire Bretagne conditionne désormais l’application des résultats d’HMUC à une étude socio-économique conforme aux exigences de la loi Duplomb, qu’HMUC soit « validée » ou non. L’expertise scientifique est ainsi officiellement mise sous la tutelle des intérêts économiques dominants.

Mais pourquoi tant de haine contre HMUC ?

HMUC fait éclater une vérité qui fait mal et en dérange plus d’un : il y a encore de l’eau pour tous les usages dans tous les sous-bassins, y compris La Pallu. À une condition : changer radicalement le mode de partage de l’eau entre cultures. Sanctuariser l’eau disponible en la réservant au maraîchage, légumes de plein champ, arboriculture, fourrage, semences. Il est vrai que, dans certains sous-bassins, il ne restera rien (La Pallu) ou pas grand-chose (Auxance) pour arroser maïs et blé. C’est donc un changement qui regarde d’abord les agriculteurs ; or, jusqu’ici la Chambre d’Agriculture n’a pas voulu modifier la répartition des volumes prélevables dont elle a la charge. Pire : longtemps les agriculteurs engagés dans les projets de méga-bassines ont échappé aux restrictions estivales aux dépens des autres !

Il faut passer enfin aux solutions.

Le temps des manœuvres de diversion est passé. L’opinion publique est désormais informée ; elle voit régulièrement des cours d’eau qui manquent d’eau et sait combien sont liés irrigation intensive et empoisonnement des eaux destinées à l’eau potable par les pesticides. Elle sait que quantité et qualité de l’eau potable vont de pair. La diversion a échoué ici aussi. La dramatisation des restrictions d’irrigation ne convainc plus personne. Cela explique, mais ne justifie pas la perte de contrôle des irrigants quand ils appellent à « traquer » les anti-bassines.

Il est encore temps de mettre en œuvre les solutions qui ont fait leurs preuves : restaurer les fonctions des cours d’eau et zones humides vis-à-vis des nappes souterraines ; restaurer les capacités des sols agricoles à stocker et filtrer les eaux pluviales. Cela suppose une conversion à l’agro-écologie et la création de nouvelles filières : il y faudra moins de temps que pour renoncer aux méga-bassines ! Il a fallu 10 ans. Il n’en faut que 4 pour voir les effets du reméandrage d’un cours d’eau sur le volume d’eau stockée dans les nappes.

Vienne Nature, LPO Poitou-Charentes et UFC-Que Choisir 86

Crédit photo : Vienne Nature