Communiqué de presse - 20/10/2022

ALERTE SUR L’EAU DANS LA VIENNE : POUR UNE NOUVELLE & PLUS JUSTE GESTION DE L’EAU SUR LE BASSIN DU CLAIN

Invitation à coconstruire un Plan Territorial de Gestion de l’Eau selon l’instruction gouvernementale du 7 mai 2019

 

Les associations Vienne Nature, la Ligue pour la Protection des Oiseaux, UFC/QUE CHOISIR, la Confédération Paysanne, la Fédération de Pêche 86 travaillent depuis de nombreuses années sur les sujets essentiels de préservation des ressources naturelles, de respect de la biodiversité et de l'environnement, d’agriculture paysanne au niveau local et national. Elles sont expertes et concernées par la construction et la signature du protocole.

Des élus municipaux, communautaires, départementaux, régionaux et nationaux se mobilisent pour la défense de la ressource en eau dans la Vienne.

Ces associations et ces élus sont directement concernés par la construction et la signature du protocole sur les bassines, et bien au delà, par la gestion globale, qualitative et quantitative de l'Eau sur le bassin du Clain.
Cette gestion globale doit s’écrire dans le cadre d’un Projet Territorial de Gestion de l’Eau (PTGE). Ce document n’existe pas sur notre territoire.

Pourquoi cette seconde version du protocole sur les réserves de substitution sur le bassin du Clain, soumise récemment au vote des élus locaux, est un projet dangereux et ne peut pas faire office de PTGE sur notre territoire.

Ce protocole ignore les particularités du territoire : la capacité des nappes est insuffisante au regard des besoins
D’une part l’eau extraite de la nappe profonde réservée à l’alimentation en eau potable est chargée de molécules, notamment le fluor, ce qui oblige à une dilution avec les eaux de la nappe superficielle pour être utilisée. Ainsi les principaux usages, qu’il s’agisse de l’alimentation en eau potable, le soutien des cours d’eau, l’irrigation agricole se retrouvent en concurrence pour prélever dans la nappe superficielle. D’autre part, il est reconnu que nos nappes ont une capacité modeste et insuffisante pour répondre à l’ensemble de ces usages.

Ce protocole augmente l’offre des volumes de prélèvement pour l’irrigation alors que les ressources déjà insuffisantes s’épuisent.
Malgré la baisse de 20% des volumes annoncées pour les 30 réserves prévues dans le protocole, les volumes mis à disposition de l'irrigation vont augmenter. Sans réserves, les prélèvements ont été limités par des arrêtés en été pour préserver les milieux et éviter les assecs. Avec les réserves ils seront prélevés en hiver. L'augmentation potentielle varierait de 35% à 92% selon les sous-bassins !
Ces prélèvements énormes que nous promet le protocole sont-ils une réponse sérieuse à la pénurie d’eau qui touchera tous les 285 000 habitants du bassin du Clain ?

Ce protocole ignore la complexité de la recharge des nappes.
La recharge hivernale des nappes se fait de plus en plus difficilement depuis les dernières années. Une étude HMUC (Hydrologie Milieu Usages Climat) est en cours sur le bassin du Clain pour évaluer la ressource en eau disponible. Ce protocole sans en attendre les résultats, donc sans garantie de recharge des nappes pour remplir les réserves en hiver et maintenir le débit des cours d’eau en été, propose de prélever l’hiver et principalement dans les nappes, 8 Millions de m3 qui s’ajouteraient aux 8,5 Millions de m3 déjà autorisés pour remplir les plans d’eau pour l’irrigation et l’arrosage de cultures.

Ce protocole nie la notion de substitution.
Un aveu de Mr le Préfet précise que les volumes estivaux substitués des irrigants raccordés aux réserves seront mis à disposition des irrigants non raccordés pour qu'ils puissent conserver leurs volumes dérogatoires : c'est donc la négation même de la notion de substitution.

Ce protocole soutient un modèle agro industriel mais ignore les besoins de l’ensemble de la profession : le protocole n’est pas la ‘brique agricole’ d’un PTGE.
Ces réserves ne bénéficieront qu’à moins de 50% des irrigants du bassin du Clain bien que financées largement par des fonds publics et ceci sans contrepartie en termes de pratique culturale ni d’économie d’eau, ni de limitation des surfaces irriguées. Ce protocole instaure une inégalité d’accès à l’irrigation.

Ce protocole ignore les besoins en eau potable : c’est une gestion partielle de l’eau !
Alors que les niveaux des nappes n’ont jamais été aussi bas et que les cours d’eau battent les records d’assec le seul programme structurel à l’ordre du jour, le « protocole », fait l’impasse sur l’enjeu AEP. En prévoyant le doublement des prélèvements en nappes hors période de basses eaux. Il la met en danger. Il la met aussi en danger en maintenant à un niveau insoutenable le volume des prélèvements estivaux faute d’une substitution réelle.
Sur le bassin du Clain, l’eau potable est dégradée de manière permanente par les pollutions diffuses des nitrates et des pesticides. Les contre parties annoncées dans le protocole sont-elles compatibles avec des modèles qui s’appuient sur le rendement et non sur la qualité. Les pratiques culturales vertueuses existantes sont passées sous silence. Les quelques engagements limités aux exploitations des SCAGE ne suffiront pas à améliorer la qualité de l’eau potable. C’est l’ensemble des activités qui est concerné.

Ce protocole ignore la pérennité des milieux aquatiques : le protocole ne répond pas à une véritable gestion de l’eau.
Les réserves n’ont pas été localisées, dimensionnées là où les prélèvements estivaux impactent le plus les débits d’étiage mais là où les membres des SCAGE souhaitaient des réserves. Ces réserves sont un projet agricole avant d’être un projet de protection des milieux mais cependant financé par l’Agence de l’eau. Les résultats de l’étude HMUC permettront de réorienter ces choix.

Ce protocole ne tient pas compte des activités économiques liées à l’eau sur le bassin du Clain : ce n’est pas un projet de territoire.
L’impact des réserves et de leur prélèvement sur les activités liées à l’eau qu’elles soient de loisirs, touristiques ou économiques fait totalement défaut dans un contexte de diminution des ressources. L’activité du territoire ne se limite pas à celle des SCAGE.

L’objet de ce protocole n’est que le financement des réserves avec un principe fondateur dévoyé : ‘le protocole vaut PTGE’.

Il n’est qu’une gestion très partielle de l’eau sur le bassin du Clain. Il ne respecte pas l’instruction gouvernementale PTGE  (projet de territoire de gestion de l’eau) du 7 mai 2019 qui permet de prendre en compte tous les aspects de la gestion de l’eau, pour tous les usages, sur tout le territoire et en accord avec tous les acteurs du territoire.

Sans s’appuyer sur les résultats de l’étude HMUC, ce protocole propose un projet qui est sans fondement et très risqué pour l’alimentation en eau potable et la survie des milieux aquatiques.

Pourquoi et comment nous souhaitons proposer la coconstruction d’un Projet Territorial de Gestion de l’Eau d’Initiative Citoyenne sur le bassin du Clain dans les semaines et mois à venir.

Indispensable, et attendu : le projet Territorial de Gestion de l’Eau sur le bassin du Clain.
Si le protocole V2 "fait office de PTGE", c'est seulement sur une brique "Agricole" incomplète puisqu'elle ne concerne que l'irrigation pour une partie seulement des irrigants, qui n'est pas un usage prioritaire au regard de la Loi sur L'Eau et les Milieux Aquatiques. Cette loi détermine que l'usage de l'eau dans un objectif économique (dont l'agriculture, l'industrie et l'énergie) passe après les milieux naturels, la priorité étant faite à la ressource en eau potable, en quantité et qualité.

Nous proposons, dès cet automne :
• La préfiguration de la démarche de coconstruction avec les associations et instances impliquées (dont VNE, UFC Que Choisir, LPO, Fédération de pêche de la Vienne...),
• Un appel aux citoyens, élus & instances volontaires et intéressés par la démarche : nouvellegestiondeleau86@proton.me
• Une journée de lancement et de réflexion sur la démarche le 11 décembre : présentation du processus de coconstruction et de coopération, ateliers, conférence.
• Semestre 1 de 2023 : démarrage du processus

Cet enjeu est citoyen et transpartisan, il concerne les habitants, les associations de défense de l’environnement, les acteurs économiques, dont les agriculteurs, les instances de gestion de l’eau et tous les élus soucieux :
• du respect de la Loi sur l’Eau & les Milieux Aquatiques / LEMA,
• de la prise en compte de leur voix dans la perspective d'une meilleure et plus juste gestion de l'eau sur le bassin du Clain.

Qu’est ce qu’un projet Territorial de Gestion de l’Eau ?

« Le projet de territoire pour la gestion de l’eau (PTGE) est une démarche qui vise à impliquer les usagers de l’eau d’un territoire (consommation d’eau potable, usages pour l’agriculture, l’industrie, l’énergie, la navigation, la pêche, etc.) dans un projet global en vue de faciliter la préservation et la gestion de la ressource en eau.
Le PTGE est pensé sur un périmètre cohérent d’un point de vue hydrologique ou hydrogéologique. Il est élaboré dans une perspective d’arriver sur la durée à un équilibre entre besoins et ressources en eau, à une certaine sobriété dans les usages de l’eau, à préserver la qualité des eaux et la fonctionnalité des écosystèmes aquatiques, à anticiper le changement climatique et ses conséquences sur la ressource en eau et à s’y adapter…
Il s’appuie sur un diagnostic et un dialogue avec les acteurs du territoire et permet de déterminer le programme d’actions à mettre en œuvre.
Le PTGE est également élaboré en tenant compte des documents de planification phare en matière d’eau, notamment le schéma directeur d’aménagement et de gestion des eaux (SDAGE)… »

Texte(s) de référence :
Principalement l’instruction du Gouvernement du 7 mai 2019 relative au projet de territoire pour la gestion de l’eau (qui abroge l’instruction du 4 juin 2015 relative aux financements des Agences de l’eau pour les retenues de substitution)

Consultez l'article de la Nouvelle République / Centre Presse à ce lien : Vienne, contre les bassines ils proposent une initiative citoyenne transpartisane (21/10/2022)

 

Photo : ancienne bassine dans le département de la Vienne. Crédit : Olivier Prévost (tout droit réservé, ne pas utiliser sans autorisation)